ALSTOM et INDUSTRIE FERROVIAIRE

Conférence de presse du 26 septembre 2016

Dans cette vidéo Christian Garnier, CGT Alstom, et Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, ont critiqué la stratégie d’Alstom qui consiste à délocaliser la production ferroviaire pour réaliser toujours plus de profits et mettre en concurrence les salariés pour mieux les exploiter.

Texte de l’intervention de Philippe Martinez secrétaire général de la CGT

"Bonjour à toute et à tous,

Nous sommes au début d’une semaine importante pour l’avenir du site d’Alstom Belfort, et de façon plus large celle de tous les sites du groupe.

Au-delà du site d’Alstom, c’est l’avenir de la filière industrielle ferroviaire dans notre pays qui est en jeu et ses 25 000 emplois.

La CGT dénonce et demande l’arrêt de ce jeu de poker menteur qui se joue entre le gouvernement, la Direction d’ALSTOM et les dirigeants des entreprises publiques SNCF et RATP.

Le gouvernement fait mine de découvrir un dossier qui est pourtant sur sa table depuis des mois. C’est un dossier qui a été régulièrement abordé au Conseil National de l’Industrie et au Comité Stratégique de la filière Ferroviaire dans lesquels la menace de milliers de suppressions d’emplois a été pointée régulièrement.

En 2004 déjà, le « plan Sarkozy », alors Ministre de l’Economie, se traduit par une participation de l’État au capital, qui sera revendue à Bouygues en 2007 après avoir supprimé 11 500 emplois.

La CGT et ses organisations professionnelles et territoriales n’ont cessé d’alerter les pouvoirs publics, dont le président de la République, sur les conséquences des politiques d’austérité conduites dans le transport public et sur l’avenir de la branche industrielle ferroviaire de notre pays.

Car c’est bien le désengagement financier de l’État sur les infrastructures ferroviaires et l’absence de courage politique du gouvernement en matière de transports qui ont conduit à la situation que vivent les salariés d’ALSTOM, mais aussi les cheminots et les traminots.

D’ailleurs, le refus du gouvernement de reprendre la dette du système ferroviaire – contrairement à la plupart des pays européens – et pourtant inscrite dans la loi du 4 août 2014 comme devant être le tremplin pour réussir la réforme, sacralise un désengagement de l’État qui va exacerber la dégradation du service public ferroviaire et le niveau de sécurité sur le réseau. Ce renoncement est complètement à contre-courant du discours officiel politico-médiatique pour sauver le site d’Alstom Belfort.

Par ailleurs, nous sommes bien loin des discours environnementaux vertueux sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre et de particules fines. 
Les émissions de gaz à effet de serre par le transport routier sont reparties à la hausse en 2015, allant à l’opposé des objectifs de la COP 21 et des conférences environnementales visant à limiter le réchauffement climatique. 
Rappelons également que la CGT en 2014 avait mis en garde le gouvernement et son ministre Montebourg, sur les risques encourus par la branche ferroviaire d’ALSTOM lorsqu’il a validé la vente à General Electric de sa branche énergie représentant 70% des activités du groupe.

Les dirigeants d’ALSTOM jouent les vertueux. À les écouter, ils seraient presque des victimes. Quel contraste insoutenable entre les superlatifs entendus, fin août 2016, pour qualifier le contrat décroché aux Etats-Unis , « historique » « contrat du siècle », et les annonces quelques jours plus tard de la fermeture du site de Belfort !

En effet, alors que l’entreprise a un carnet de commandes de plus de 30 milliards d’euros, représentant plus de 4 années de carnet de commandes et un résultat de 3 milliards d’euros, la stratégie d’ALSTOM consiste à délocaliser la production ferroviaire pour réaliser toujours plus de profits.

Ils savent que les délais de livraison ne sont pas respectés, que la qualité de la production se dégrade, que les conditions sociales des salariés sont déplorables, contribuant aussi au dumping social qui fait tant de mal à l’ensemble des salariés européens. Aujourd’hui, ALSTOM paye des pénalités importantes pour fait de retard et de mauvaise qualité.

Dans leur logique financière, la satisfaction des actionnaires devient prépondérante à l’ensemble des autres critères pourtant cruciaux sur une vision à long terme de l’avenir de l’entreprise. 
C’est donc de façon volontaire et réfléchie que la direction d’ALSTOM met en péril les sites de production en France. Et, dans le même temps, ALSTOM a touché 6,3 millions d’euros de Crédit d'Impôt Compétitivité Emploi et 86 millions d’euros de Crédit d'Impôt Recherche de la part de l’État en 2015. Nous sommes en droit légitime aujourd’hui de demander : À quoi a servi cet argent public ?

D’ailleurs, la direction d’ALSTOM ne s’en cache pas, elle souhaite désormais tout miser sur la maintenance, considérant qu’il y a plus de marge à faire sur ce secteur que sur la production. Façon aussi de mettre la pression sur les salariés français en les plaçant en concurrence pour mieux les exploiter. 
Peu importe l’avenir industriel, la perte des savoir-faire et des capacités de production, l’importance de la maintenance intégrée dans la chaîne sécurité, tant à la SNCF qu’à la RATP, pourvu que les dividendes versés aux actionnaires progressent !

Il est urgent de sortir l’industrie ferroviaire des exigences financières pour les actionnaires, comme il est urgent de rappeler que le financement par l’argent public doit servir l’emploi et l’industrie. C’est la question de quelle maîtrise et contrôle public d’une industrie répondant essentiellement à des commandes publiques qui est posée.

Concernant les dirigeants des entreprises publiques SNCF et RATP, ces derniers se cachent derrière l’obligation d’appel d’offre européen pour attribuer des marchés à des entreprises espagnoles ou allemandes soi-disant plus performantes. Ils omettent de dire que ces appels d’offre peuvent contenir des critères qualitatifs, sociaux et environnementaux qui permettraient de garantir la production en France. 
Les USA imposent bien à ALSTOM de fabriquer les TGV sur leur territoire. La Suisse exige que les commandes passées à ALSTOM soient produites à Belfort pour en garantir la qualité. Les prétextes évoqués par les présidents de la SNCF et de la RATP ne tiennent pas. Surtout quand ils développent une politique routière avec leurs filiales en concurrence directe avec le rail.

La CGT affirme que le site de Belfort a de l’avenir, car les besoins en locomotives et motrices sont énormes (tant voyageurs que marchandises) et la technicité des salariés est un atout incontestable. Le maintien du site de Belfort passe par des choix politiques et des stratégies d’entreprises qui ne soient pas guidés par les financiers et quelques actionnaires sans scrupules. L’industrie ferroviaire française est un fleuron mondialement reconnu, ce sont les salariés des sites nationaux qui ont conquis ce rayonnement.

Nous ne laisserons pas sacrifier sur l’autel de la finance les salariés d’ALSTOM de Belfort et l’industrie ferroviaire nationale considérée d’excellence pas plus tard qu’en 2014 par les pouvoirs publics.

Le ferroviaire doit continuer à être un mode de transport de masse dans un concept multimodal et de complémentarité avec les cars et les bus, à l’inverse de la libéralisation des autocars permise par la loi Macron. On commence à en mesurer les effets négatifs sur le ferroviaire, sur les dessertes des territoires accélérant le phénomène de désertification des plus ruraux, sur le plan environnemental, sans oublier le social et l’emploi, avec les premiers licenciements qui pourraient arriver dans les jours à venir.

Comme nous le faisons depuis plusieurs années, nous allons poursuivre et amplifier ce travail de convergences et unir nos propositions et nos forces dans l’intérêt général.
Il faut recréer des synergies entre les grandes entreprises de transports publics et l’industrie.
L’intelligence et les savoir-faire doivent servir le progrès social, l’intérêt général et non pas les intérêts particuliers de quelques actionnaires !

C’est en ce sens que la CGT, avec les fédérations ici présentes, nos structures territoriales, engage une campagne nationale pour le ferroviaire, enjeu majeur pour répondre à l’aménagement et au désenclavement des territoires, permettant la reconquête industrielle tout en relocalisant les productions dans plus de proximité, s’attaquer aux véritables défis environnementaux de ce 21ème Siècle, si nous voulons réellement nous attaquer au réchauffement climatique.

Forte de cette démarche, la CGT appelle à la réussite du rassemblement mardi 27 septembre 2016 à 11h00 devant le siège d’ALSTOM à Saint Ouen, lors de la tenue du Comité central d’entreprise.

Lire le communiqué des ACC et de l'UD