L’argent des contribuables dans les poches des actionnaires : mettre fin au scandale

Note du Pôle Économique Confédéral CGT

La Cgt alerte depuis longtemps : chaque année l’État et les collectivités accordent des dizaines de milliards d’euros aux entreprises, surtout au nom de l’emploi, sans résultats probants. Pis encore, certaines entreprises suppriment des emplois au mépris de leurs engagements.

Ces derniers jours, nous avons connu deux exemples scandaleux de ce gaspillage des fonds publics, de l’argent des contribuables versé aux entreprises et qui se trouve au bout du compte dans les poches des actionnaires.

Nokia annonce la suppression de 600 postes, alors que l’an passé l’entreprise a reçu 67 millions d’euros au titre du crédit d’impôt-recherche (CIR) et du Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). La suppression de ces postes revient à dire que les actionnaires de Nokia auront reçu 100 000 euros d’argent public par poste supprimé ! Sans compter les 4,4 milliards d’euros que Nokia leur a versés en dividendes et rachat de ses propres actions.

Caterpillar annonce la fermeture du site de Monchy-le-Preux d’ici fin 2018. Plus de 60 emplois sont en cause. Selon le sous-préfet d’Arras, l’entreprise a touché 110 000 euros en 2014 au titre de la « prime d’aménagement du  territoire »  (PAT).  Au  bout  du  compte,  les  actionnaires  ont  touché  1.700 euros par emploi supprimé au titre de la PAT, sans compter d’autres aides et exonérations.

En effet, les entreprises ont droit à plus de 2.000 dispositifs d’aides publiques. À notre connaissance, les données synthétiques récentes ne sont pas disponibles, mais sur la base d’un rapport de la Cour des comptes, on peut estimer  que  chaque  année  l’État  et  les  collectivités  accordent  quelque  200 mds d’€uros d’aides et exonérations sociales et fiscales aux entreprises. Cela représente environ 10 % du PIB de la France. Déjà en  2010,  la  Cour  des  comptes  chiffrait  ces  aides  et  exonérations  à  172 milliards d’euros. Depuis, de nouveaux dispositifs sont mis en place, à l’instar du CICE d’un total de 20 mds € par an, ou encore le « pacte de stabilité » pour un total de 9 mds (cf. portail  du ministère : https://www.economie.gouv.fr/pacte-responsabilite/entreprises).

Il est temps que ces aides et exonérations soient soumises à une évaluation sérieuse et plurielle.

 C’est ce revendique la Cgt depuis de nombreuses années.

Détails des 172 Md€ d’aides et exonérations selon le rapport de la Cour des comptes

  • 35 Md€ de « dépenses fiscales ». Les plus importants concernent : les taux réduits de TVA  pour  15 Md€ ; les dispositions concernant l’impôt sur les sociétés et l’impôt sur le revenu pour les entreprises individuelles, pour un total de 10 Md€ (dont le CIR) ;
  • 71 Md€ de « modalités particulières de calcul de l’impôt ». Les plus importants concernent les différents régimes d’intégration fiscale (régime des sociétés mères et filiales, intégration fiscale de droit commun) pour 55 Md€ ; la taxation au taux réduit des plus-values à long terme provenant de cession de titres de participations dans les fonds commun de placements à risque (FCPR) et sociétés de capital-risque (SCR) pour 8 Md€ ;
  • 31 Md€ d’allègements et d’exonérations de cotisations sociales ;
  • 26 Md€ d’exemptions d’assiette, notamment au titre de la participation financière et de l’actionnariat salarié, du PERCO, des chèques vacances et titres restaurant…
  • 10 Md€ de dispositifs non chiffrés mentionnés à l’annexe V du

24 groupes ont touché 1,6 mds€ au titre du CICE en 2014

 

Entreprise

 

Secteur

CICE au titre de 2014 (millions €)

CICE au titre de 2013 (millions €)

% du résultat net en 2014

AccorHotels

Hôtellerie

18,8

10,5

8,4

Air France

Transport

66

43

N.P.

(perte)*

Alstom

Industrie

11

N.C.

1,5

Axa

Finance

15,9

10,7

0,3

BNP Paribas

Finance

39

26

7,7

BPCE

Finance

107

71

3,7

Canal +

Audiovisuel

0,5

0,4

N.C.

Carrefour

Distribution

120

79

8,6

Engie (GDF Suez)

Énergie

90

62

3

Foncière Euris

Finance

97

76

13,6

La Poste

Services

350

297

48,7

Lafarge

Industrie

5,8

3,8

2,1

L'Oréal

Industrie

11

8

0,2

Orange

Communication

110

79

9,2

Pernod-Ricard

Agroalimentaire

2,6

1,7

0,2

PSA

Automobile

66,1

80

N.P.

(perte)*

Renault

Automobile

36

50

1,8

Safran

Industrie

39

26

3,2

SNCF

Transport

318

180

51

Sodexo

Services

38

17

7,5

Technip

Services

3,2

1,5

0,7

Total

Energie

29

19

0,7

Valeo

Industrie

15

10

8,6

Vivendi

Médias

5

N.C.

0,1

* Non pertinent en raison du résultat net négatif

Source : Journal du Net, http://www.journaldunet.com/economie/magazine/1157975-cice- 2014-des-grandes-entreprises-francaises/