Les Partenariats Public Privé : malgré le bilan, toujours dans le vent.
- Détails
- Catégorie : Expressions Interprofessionnelles
- Mis à jour : lundi 4 août 2014 18:01
- Affichages : 11329
Un Partenariat Public Privé (PPP) est un contrat passé entre une collectivité (du local à l'État) et un groupe privé. Souvent, il est utilisé pour construire et gérer un bâtiment public : hôpital, école, prison etc. Il induit un financement par le groupe privé, qui sera "remboursé" au terme de loyers versés par le service public ayant l'accès au bien produit. Les remboursements s'étalent sur plusieurs décennies. La quasi totalité des prestataires sont des multinationales : Vinci, Eiffage, Bouygues, Orange etc.
Les PPP ont vu le jour par décret (sans débat) en 2004. Ils étaient sensés être, à cette époque, exceptionnels du fait de leur caractère "dérogatoire" ; c'est à dire de l'ingérence d'entreprises privées dans la gestion de biens publics. Le Conseil Constitutionnel devait veiller au respect des contraintes de ce genre de partenariat, et du coup préserver l'intérêt public.
Mais la donne fut revue lors de l'accession de Sarkozy au pouvoir en 2008. Il y voyait en effet un levier de relance de la croissance, mais surtout de substantielles ressources pour ses amis patrons de multinationales qui allaient profiter de ce nouveau et juteux système.
C'est ainsi qu'à l'heure actuelle, 239 PPP existent et représentent près de 1,2 milliards d'euros de loyers par an à la charge de l'État, et ce jusqu'en 2025 !!! L'engagement dans ce genre de contrat est souvent comparé à un "crédit revolving" pour un particulier, avec les taux fluctuants, et l'incertitude totale de capacité de financement à terme.
On assiste à un boom de ce genre de partenariat depuis 2 ans et surtout dans les collectivités locales : 160 contrats passés. Une explication est l'élection municipale qui s'est tenue cette année. En effet, la prise en charge totale du financement des travaux par l'entreprise privée, et le début des loyers à payer étant différé, les élu-e-s locaux y ont eu largement recours pour pouvoir mettre dans leur bilan la construction d'une école, d'un nouveau réseau routier etc. sans l'avoir directement imputé dans le budget municipal.
Or le problème, c'est bien le remboursement de ces projets.
Déjà, nombre de PPP ont été sous évalués dès le départ : Musée Picasso (+39% du prix prévu), la Cité de l'Architecture à Paris (+84% !!!)... Et il n'est pas question de ne pas recouvrer ses créances avec les interlocuteurs privés, même si en moyenne les prix finaux sont supérieurs de 25 % aux prix prévus. De plus, les mensualités de remboursement à la charge du public prennent en compte l'entretien et toute une série de charges imposées, sur une durée allant jusqu'à 30 ans. Par exemple le Stade Vélodrome de Marseille coûtera 11 millions d'euros par an jusqu'en 2044 à la ville. Q'en sera t-il si l'O.M. joue en nationale d'ici là ?
Dans le département, Clermont Université a confié la construction du laboratoire "magmas et volcans" à l'entreprise GCC, elle même dénoncée par la CGT construction pour recours aux salarié-e-s détaché-e-s. : voir vidéo No1, vidéo No2 et vidéo No3.
Outre l'endettement pour les collectivités, la dégradation des services publics pour cause de réductions de budgets et la maltraitance de certains salarié-e-s des multinationales, les PPP sont autant de travail en moins pour les entreprises locales TPE ou PME, qui ne peuvent pas rivaliser avec ces grands financiers.
Avec les PPP, on n'a rien à gagner, nous public. Ils enrichissent encore plus des entreprises multinationales et sont un facteur de dégradation de nos services publics : surendettement des hôpitaux, explosion des coûts de scolarité...
Le Sénat s'est prononcé il y a 15 jours sur la nécessité d'encadrer plus rigoureusement ces systèmes. Un rapport de l'inspection générale des finances se prononce aussi dans ce sens. Michel Sapin s'insurgeait contre les PPP en 2004, peut-être n'aura t'il pas changé d'avis maintenant qu'il est ministre de l'économie, ou peut être que "cet ennemi qui n'a pas de visage" tire les ficelles purement et simplement.