La Branche Famille : Une place cruciale au sein de la Sécurité Sociale

Montreuil, 7 août 2017

L’ordonnance du 4 octobre 1945 portant organisation de la Sécurité sociale indique dans son article premier qu’il « est institué une organisation de la Sécurité sociale destinée à garantir les travailleurs et leurs familles contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leurs capacités de gains, à couvrir les charges de maternité et les charges de famille qu’ils supportent ».

La famille est au cœur de la Sécurité sociale. Les prestations familiales représentent au départ plus de 50 % des dépenses du régime général. L’importance des allocations familiales s’illustre par le fait qu’au début des années 1950, la moitié du revenu d’une famille ouvrière avec trois enfants est constituée de prestations familiales.

À la Libération, assurances sociales et caisses de compensation pour allocations familiales deviennent, organiquement, la Sécurité sociale.

Il s’agit d’un système ambitieux dans ses objectifs et simple dans sa construction, avec une logique de transferts monétaires et de prestations directement versées à la famille sans affection préalable à tel ou tel besoin.

La logique des revenus de remplacement se déploie avec l’assurance maternité, et celle des compléments de revenus avec les allocations familiales.

Sur un plan fiscal, la loi de finances du 31 décembre 1945 institue, dans le cadre de l’impôt sur le revenu, le mécanisme du quotient familial : le calcul de l’impôt prend en compte la taille et la configuration de la famille en la décomposant en unités de consommation.

Une véritable rupture s’opère dans les années 1970 avec une socialisation de la politique familiale.

D’une politique familiale, le système élaboré après-guerre glisse insidieusement vers une politique sociale, dans un souci de rationaliser les dépenses sociales.

Les orientations marquantes de la période récente sont celles de la recherche d’économies pour limiter la progression des dépenses.

Dans le cadre des plans de rééquilibrage des comptes de la Sécurité sociale, un ciblage accru et un usage plus systématique des conditions de ressources ont présidé au changement des prestations et à l’établissement de nouvelles allocations.

Les déficits cumulés conduisent à rogner sur les diverses prestations en place, soit en les revalorisant le plus faiblement possible, soit en tentant d’en écarter certains bénéficiaires.

Enjeux des politiques familiales

Trois types de bénéfices sont attendus :

  • des bénéfices espérés à relativement court terme de politiques favorisant la conciliation entre travail et vie de famille de parents de jeunes enfants. Ces politiques ont pour objectif d’encourager une plus grande participation des parents à l’emploi, de réduire la fréquence des interruptions d’emploi, et donc d’accroître le montant des richesses produites ;
  • un effet positif sur le développement des capacités dès l’enfance est espéré, avec des effets à long terme favorisant la croissance économique ;
  • un effet positif sur la cohésion sociale est également attendu de politiques éducatives visant à prévenir le développement de « comportements » à risque.

La prise en charge de l’éducation des enfants doit donc être considérée comme un bien public.

L’ensemble des individus bénéficient des effets positifs des transferts de prise en charge en direction des familles. Les politiques familiales doivent être vues comme un investissement susceptible de générer des retombées futures très positives et non plus comme une dépense nette ou un coût pour la collectivité.

Pour la Cgt, 5 grandes catégories d’objectifs sont à développer ou à conforter :

  1. Compenser le coût direct des enfants pesant sur le budget des familles pour limiter les écarts de niveaux de vie existant entre les ménages avec ou sans enfants.
  2. Aider les parents à concilier travail et vie de famille et ainsi favoriser le développement de l’accès et de l’évolution des femmes au travail. L’investissement réalisé en mode d’accueil est constaté à relativement court terme.
  3. Soutenir le développement cognitif et social des enfants. Il s’agit de permettre aux enfants de se développer dans un contexte d’égalité des droits et de compenser d’éventuels déficits se manifestant très tôt dans l’enfance.
  4. et 5. Deux autres objectifs doivent être recherchés : tout d’abord, la promotion de l’égalité entre les sexes, non seulement en matière de situation professionnelle mais aussi en matière de répartition équitable des activités de soin et d’éducation des enfants. Dans ce cas, la compensation des coûts indirects des enfants, aujourd’hui principalement supportés par les femmes, devient un objectif. Le renouvellement des générations est également un objectif visé. La France est en tête des pays européens pour son taux de fécondité grâce à une politique globale, forte et diversifiée. Il importera pour les années futures de conserver ces grands équilibres.

Les politiques tendant au plein emploi sont de nature à favoriser la progression des politiques familiales. Ces dernières sont également créatrices d’emploi et de croissance.

Elles jouent aussi un rôle important dans la réduction des niveaux de pauvreté, l’accroissement des niveaux de vie des familles et pour l’égalité entre les femmes et les hommes. Elles sont enfin créatrices de plus de revenus fiscaux issus de l’activité.

Ces retombées économiques positives peuvent, en grande partie, servir à financer les politiques nécessaires pour alimenter cette dynamique.

Toutes les politiques qui encouragent les parents de jeunes enfants à reprendre une activité après la naissance et à partager les activités liées à leur charge sont bonnes en matière d’emploi, de baisse du taux de pauvreté et de hausse du taux de fécondité. Pour cela, l’octroi d’un congé, d’une durée limitée et rémunéré à hauteur du salaire des parents qui occupent un emploi, peut encourager la reprise d’emploi et un partage plus équilibré du travail domestique entre les parents. Une offre de services d’accueil de qualité pour la petite enfance complétant la prise en charge des parents est bien entendu nécessaire.

La CGT Propose :

Droit à une politique familiale solidaire

L’accueil, les soins, l’entretien et l’éducation des enfants représentent une fonction sociale qui engage l’avenir de la société. Cela justifie une politique familiale de haut niveau et la participation des entreprises à son financement.

Cette politique familiale doit permettre de soutenir et encourager le travail des femmes quelles que soient leurs responsabilités familiales :

  • prestations familiales (Sécurité sociale) et fiscalité (État) sont deux composantes essentielles du soutien apporté aux familles par la société ;
  • les équipements et services accueillant les enfants, les jeunes et les familles doivent prendre une part importante et être mieux répartis sur les territoires, en quantité et qualité, dans le développement d’une politique familiale solidaire ;
  • l’universalité du droit aux allocations familiales doit être réaffirmée, car elle permet de maintenir le ni- veau de vie entre les ménages sans enfants et les ménages ayant des enfants à charge ;
  • le droit aux allocations familiales (non imposables et sans conditions de ressources) doit être assuré dès le premier enfant ;
  • le montant du complément de libre choix (ou optionnel) d’activité qui indemnise le congé parental doit se faire sur la base du salaire antérieur du parent salarié en congé parental et être versé jusqu’à la fin de la première année de l’enfant.

Financement de la branche Famille :

Par la cotisation sociale

Le financement de la branche famille par la cotisation sociale donne de la valeur économique à des activités menées hors du marché du travail et sans profit. Il correspond actuellement au quart du PIB. Une augmentation de la cotisation sociale permet ainsi une croissance du PIB : c’est bon pour l’économie.

Au contraire, l’augmentation du nombre d’exonérations portant sur les cotisations sociales fait croître la part des dividendes et de l’épargne des entreprises.

La « baisse des charges » ne soutient donc pas la compétitivité française. Les études réalisées ne montrent aucun effet positif des exonérations de cotisation sociale sur l’emploi dans les entreprises concernées. Elles privent également les services publics de moyens supplémentaires, puisqu’elles ne sont pas compensées totalement par l’impôt.

La cotisation sociale est donc menacée par le transfert vers la cotisation sociale générale (CSG), outil de développement du profit capitaliste.

En définitive, l’idée que les cotisations sociales employeurs n’ont pas de raison d’être n’a pas de base économique solide. Les cotisations familiales sont un instrument de politique familiale. Il n’y a pas de raison d’éliminer toute contribution des employeurs à la reproduction sociale des travailleurs. Au contraire, la supprimer fragilise le financement de la branche famille.

Les politiques familiales doivent être vues comme un investissement et non comme une dépense nette.

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Voir la vidéo de l'UD Cgt des Bouches du Rhône sur le financement de la Sécu et surtout les manques de financement au profit du capital...