Présidence autrichienne de l’Union Européenne

Note Confédérale, Montreuil le 17 août 2018

Lors des dernières élections législatives autrichiennes du 15 octobre 2017, le parti conservateur ÖVP est arrivé en tête avec 31,5% des suffrages, suivi du parti social- démocrate SPÖ à 26,9% et du parti d’extrême-droite FPÖ à 26%. ÖVP et FPÖ sont parvenus à conclure un contrat de coalition le 15 décembre 2017. Sebastian KURZ a officiellement été investi chancelier fédéral (1er Ministre) le 18 décembre 2017.

Depuis le 1er juillet 2018, l’Autriche exerce pour 6 mois la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne, c’est-à-dire qu’elle est chargée pendant cette période d’organiser et de présider les différentes réunions du Conseil de l’UE et surtout d’élaborer des compromis susceptibles de résoudre les problèmes politiques.

Cette position institutionnelle permet aux forces nationalistes qui se développent dans différents pays européen (Italie, Hongrie, etc.) d’exercer une pression renforcée sur le contenu de l’agenda politique européen.

L’Autriche a placé sa présidence sous le mot d’ordre de « l’Europe qui protège », slogan décliné en trois priorités :

  • « La sécurité et la migration » ;
  • « Le maintien de la prospérité et de la compétitivité » ;
  • « La stabilité dans le voisinage : le rapprochement des Balkans (occidentaux et du sud-est) à l’Union européenne ».

Il convient maintenant de décrypter ces slogans :

  • « Une Europe qui protège » : ce sont surtout les migrants qui sont visés ! Le programme de cette présidence ne dit rien sur les droits sociaux, la protection contre le changement climatique, la pauvreté, les guerres, les persécutions par exemple, autant de sujets sur lesquels les citoyens demandent à l’Europe d’agir immédiatement ;
  • « La sécurité et la migration » : le choix d’accoler sécurité et migration traduit clairement la vision négative de la migration et des migrants portée par les forces conservatrices et d’extrême-droite ; en faire la première des priorités est encore plus révélateur. Concrètement, l’Autriche propose de créer des centres de migration situés en dehors de l’Union européenne ;
  • Pour le « maintien de la prospérité et de la compétitivité », la présidence autrichienne entend lutter contre la « surréglementation », c’est-à-dire la possibilité légale pour les Etats membres de transposer de façon plus favorable aux travailleurs les directives européennes, notamment dans le domaine social, environnemental ou du droit de la consommation. Il s’agit clairement d’une optique de régression, d’autant que l’Autriche instrumentalise la notion de « subsidiarité » pour remettre le niveau national au centre du processus et surtout éviter toute législation européenne en matière sociale (conformément à une vieille revendication patronale) ;
  • En ce qui concerne « la stabilité dans le voisinage », pour des raisons historiques, géographiques et économiques, les Balkans occidentaux et leur stabilité sont certes une priorité de la diplomatie autrichienne mais cette recherche de « stabilité » se fait aujourd’hui dans le cadre de « l’Europe qui protège » et de son approche fermée des migrations (voir ci-dessus).

Sur le plan interne, le gouvernement autrichien conduit une politique antisociale ouvertement favorable aux intérêts patronaux :

  • Dans le cadre de la lutte contre la soi-disant « surréglementation », la Chambre du commerce (organisation patronale) a présenté une liste de 500 textes de lois « obsolètes » ou « inutiles » contenant des obligations jugées « trop lourdes pour les entreprises », liste que le gouvernement s’est engagé à examiner. Sont ainsi visés par exemple : La durée des congés payés, qui pourraient passer de 5 semaines à 4 semaines - Les règles de licenciement...
  • Au niveau du temps de travail, le gouvernement procède à la modification unilatérale, sans négociation avec les organisations syndicales, des maxima horaires journaliers (passage de 10 à 12H) et durée maximale hebdomadaire fixée à
  • Face à ce coup de force, les syndicats ont organisés une manifestation de 100 000 personnes à Vienne fin juin 2018. D’autres actions sont à venir pour la rentrée.