Ils veulent en finir avec la Sécurité Sociale

Communiqué Fédération Cgt des Organismes Sociaux, Montreuil le 4 juillet 2018

L’amendement scélérat ou comment, en transformant dans la Constitution l’assise juridique de la Sécurité Sociale en concept plus vague de « protection sociale », Macron entend enterrer définitivement la Sécurité Sociale issue du programme de la Résistance.

Il ne s’agit pas de débats de spécialistes qui usent de concepts abscons, flous, aux contours juridiques qui n’intéressent pas grand monde. C’est l’écueil dans lequel veut nous entraîner le gouvernement : En votant, en catimini, un amendement dans le projet de réforme des institutions, les députés LREM proposent la suppression de la notion de « Sécurité sociale » dans la Constitution, pour lui préférer celui de « protection sociale ». Et c’est là une chose grave !

La Sécurité Sociale est une institution qui a pour fonction de garantir collectivement les individus contre les risques de l’existence. Ces risques sont dits sociaux parce qu’ils sont justement mutualisés par la Sécurité Sociale dans le but de promouvoir la solidarité, l’universalité et la redistribution. Par définition les « risques » sociaux (liés à la santé, à la famille, à la vieillesse, au chômage) n’ont un caractère que très partiellement prévisible. Et c’est là que nous touchons au cœur de la véritable manœuvre qui n’est pas réductible à simple débat sémantique.

POURQUOI ?

Parce que la question des « risques sociaux », par sa dimension imprévisible, fluctuante et souvent subie (qui choisit d’être malade, d’avoir un enfant handicapé, de perdre un emploi, ou de se retrouver sans ressources ???), ne peut reposer uniquement sur le dogme de l’équilibre budgétaire. Un équilibre qui n’est guère questionnée quand il s’agit de supprimer l’ISF ou l’exit-tax.

Parce que chacun paye selon ses moyens et reçoit selon ses besoins. Ce qui est juste le contrepoint absolu d’un système d’assurances privées auxquelles ce gouvernement entend livrer ce qui repose sur la solidarité.

Parce qu’il faut en finir avec le mythe du « déficit » de la Sécurité sociale. Il y a surtout un manque de financement que les gouvernements successifs, depuis de très nombreuses années, ont laissé perdurer au gré des aléas de la conjoncture économique. Ce « trou » est dû essentiellement aux nombreuses exonérations de cotisations sociales.

Parce qu’en s’attaquant à son financement, le gouvernement choisit sciemment et dans un cynisme confondant de fragiliser tout un système pour mieux le dépecer.

Parce que dans la notion de Protection Sociale il n’existe pas de dimension opératoire. Quelle protection ? Quel niveau de couverture ? Financée de quelle manière ? Dont la gestion sera confiée à qui ? Où mettons-nous le curseur et le niveau de cette protection ? Si on laisse au gouvernement et au patronat le soin de définir ce que doit être la protection sociale, gageons qu’elle ne se cantonnera qu’à un socle minimal qui laissera au secteur privé (donc payant, donc inégalitaire, donc tout sauf solidaire…) l’essentiel du système de soin, de retraite, de garde d’enfant, etc.

Oui, cet amendement pose les bases d’un démantèlement que nous avions annoncé. Que dit-il ?

Dans ce texte de réforme constitutionnelle (ce qui n’est pas une mince affaire !), le gouvernement avalise le fait qe le travail devienne précaire, alors même qu’il y a largement contribué. Les lois travail, les ordonnances Macron sont, de l’avis même du patronat, de formidables dispositifs pour licencier plus facilement tout en levant pas à pas tous les filets de protection du code du travail.

« Le chômage n’est plus un problème conjoncturel auquel il faudrait suppléer transitoirement », ce qui veut clairement dire que l’absence d’activité n’a plus à être compensée par une allocation chômage (transitoire), mais qu’il convient de réformer encore plus le « marché du travail » pour le rendre plus flexible encore et plus corvéable ceux qui sont privés d’emploi.

En somme mieux vaut la précarité que le droit à une indemnité !

Il est dit que le « financement a évolué dans le temps ». Pourtant la France se situe toujours à la 5ème position des puissances économiques mondiales en 2018. L'Hexagone affiche en effet un PIB de 2766 milliards de dollars. Le PIB français progresse de 191 milliards de dollars entre 2017 et 2018, soit une hausse de 7 %. La richesse produite n’est donc pas en cause. Ce qui l’est par contre ce sont les nombreuses exonérations et autres allègements qui en effet rendent plus fragile le financement de notre Sécurité Sociale.

C’est l’organisation défaillante de l’économie qui est fautive et non un supposé problème de financement qui ne doit qu’à des orientations politiques.

Enfin, et comme il est de coutume quand un gouvernement veut imposer une mesure sans en assumer la responsabilité, il est confortable de s’en remettre au « diktat européen ». Oubliant au passage de préciser que les décisions prises au niveau communautaire le sont bien par les gouvernements en place.

CONCLUSION

Le système de protection sociale tel qu’il se développe aujourd’hui contribue déjà suffisamment à la création de nouvelles inégalités. Eclaté, il reflète l’explosion de la fragmentation de la société. Une tendance lourde actuelle est à s’orienter vers un système de protection plancher pour les plus démunis (exemple avec le RSA) et la privatisation du reste du système avec l’introduction progressive de la capitalisation dans la protection sociale. Effectivement, l’abandon de la répartition qui s’exprime par la redistribution entre les cotisants entraîne inexorablement une vague de désolidarisation. Le principe même de la solidarité est ainsi déstabilisé par « l’engouement » du gouvernement pour la capitalisation (chacun cotise pour soi). Le futur ne peut que promettre un creusement profond des inégalités dans la continuité d’un tel sillon.

Nos propositions pour défendre et préserver notre Sécurité sociale :

  • Rétablir les principes d’une Sécurité Sociale financée par le salaire socialisé.
  • Mettre fin aux exonérations de
  • Le droit à une Sécurité Sociale à 100 % pour la Santé, la Famille, l’Emploi, la Retraite et la Perte d’autonomie.
  • Une politique en faveur de l’emploi et des salaires qui devra rompre avec la financiarisation de l’économie.

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